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![]() Celui-ci, que l'on nomme le Vert, est une créature curieuse, éclose de nos composts et nourrie aux bons sentiments. Son teint, tantôt rougeaud de l'indignation face à une poubelle mal triée, tantôt pâle des nuits passées à compter les lucioles en voie de non-existence, trahit une existence dévouée à la cause. Il ne connaît point de répit, sauf peut-être pour une petite sieste sous un chêne centenaire ; sa vie est une croisade sans fin contre l'humanité... ou du moins, contre ses mauvaises habitudes. Il arbore des atours d'une simplicité désarmante, souvent en fibre de bambou ou d'ortie, dont la couleur évoque le champ de lentilles ou la mousse de la dernière averse. Ses cheveux, libres comme les rivières qu'il rêve de voir déchaînées, sont parfois ornés d'une graine de chia, et son regard ardent, perçant, semble sonder l'âme de quiconque ose respirer à pleins poumons un air non filtré par des forêts de séquoias. Sa conversation est un déluge de termes abscons : "empreinte carbone", "économie circulaire", "biodiversité", "résilience des écosystèmes" – des mots qu'il prononce avec la ferveur d'un moine récitant ses psaumes. Il vous parlera des petits vers de terre avec la tendresse d'un père envers son enfant unique, et des calottes glaciaires fondues avec le chagrin d'un héritier spolié. Il maudit la voiture comme on maudit le diable, voue un culte au vélo, qu'il enfourche avec la grâce d'un chevalier partant en croisade, et voit dans chaque supermarché un temple de la perdition. On le rencontre partout où l'on dérange la nature, même pour poser une chaise longue. Il est aux manifestations, aux piquets de grève devant la dernière usine de chaussettes en polyester, enchaîné à une éolienne défectueuse, ou juché sur un tas de fumier, haranguant la foule d'une voix qui sent bon le bio. Il est moqué, souvent, taxé de doux dingue ou de Cassandre à sandales, mais il persiste, inébranlable, convaincu que la fin du monde est proche... à moins que vous ne triiez mieux vos déchets. Il vit d'un rien, se nourrit de graines germées et de légumes oubliés (par la civilisation, pas par lui), et refuse le confort moderne, qu'il juge complice du Grand Gâchis. Son âme est un festival de paradoxes : il est doux comme un agneau qui broute son herbe, mais aussi colérique qu'un volcan qui crache ses poumons ; patient comme une pousse de bambou, mais impatient comme un barrage qui menace de céder. Il est, en somme, un paradoxe ambulant, un prophète désarmant qui nous rappelle, avec une insistance parfois épuisante, que la planète n'est pas une poubelle géante. Mais il vit en ville ![]() | ||
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